« La commode aux tiroirs de couleurs » (2020) & « L´étrangère » (2015)

par | Sep 27, 2020

Le confinement est terminé mais ce n’est pas une raison pour fermer les livres ! Voici deux idées de lecture qui vous plairont peut-être……

  • La commode aux tiroirs de couleurs d’Olivia Ruiz
  • L’étrangère de Valérie Toranian

Deux autrices différentes mais leurs romans ont un certain nombre de points communs. O. Ruiz, chanteuse, est née en 1980 à Carcassonne, elle est d’origine espagnole. V. Toranian, journaliste, est née en 1962 à Suresne, elle est d’origine arménienne.

Le thème de ces 2 récits est la vie mouvementée de deux grand-mères, Rita et Aravni, racontée par leurs petites-filles. Le point de départ est une tragédie historique : L’Espagne sous la dictature de Franco (1939) pour Rita et le génocide arménien (1915) pour Aravni. Les deux femmes quittent leur pays dans la douleur et terminent leur vie en France.

L’exil, le déracinement, l’abandon d’êtres chers, les camps de réfugiés, les difficultés économiques et personnelles dans le pays d’accueil, l’identité, la langue que l’on parle et celle qu’on doit apprendre, l’héritage culturel que l’on veut transmettre ou non aux générations futures, les souvenirs, ce sont les lourdes valises que traînent, portent Rita et Aravni. Thème d’actualité……

Les récits sont cependant différents :

  1. Ruiz laisse sa grand-mère raconter sa vie à partir d’objets et de lettres trouvés dans « la commode aux tiroirs de couleurs » dont elle a hérité à sa mort. Chaque tiroir dévoile une partie de l’histoire de cette famille franco-espagnole. Cette histoire est une fiction car il n’y a pas eu de transmission de l’histoire familiale : « Dans cette famille, nous parlions beaucoup, à pleine voix, et surtout pour ne rien se dire. » C’est l’histoire de 4 générations de femmes fortes de Barcelone à Narbonne en passant par Argelès et Toulouse. La vie de ces femmes est difficile mais l’amour, la tendresse, la joie, l’ironie accompagnent le récit. Le ton est enlevé, pétillant : « Tu dois bien te marrer Abuela de là-haut, je suis devenue aussi bienveillante et manipulatrice que toi » dit la petite-fille dans l’épilogue en quittant son papi aux mains de « la flamboyante Lola ».

Valérie Toranian s’appuie sur des récits familiaux : « L’histoire d’Aravni est une reconstitution romancée faite à partir des notes que j’ai prises auprès de ma grand-mère pendant les dernières années de sa vie ». L’histoire commence en juillet 1915 à Amassia en Arménie pour finir en 1994 avec les derniers mots de la grand-mère. V. Toranian alterne les chapitres entre présent et passé. Les premiers chapitres nous font vivre l’atroce marche des Arméniens chassés de le chez eux par les Turcs. La Turquie nie toujours le génocide arménien : « Ce déni d’Histoire est un nœud coulant qui empêche tout Arménien, non pas de vivre, mais de respirer normalement ». Amassian, Alep, Constantinople, Marseille, Alfortville, la route est longue mais la grand-mère est une femme forte qui se bat pour survivre pour vivre, elle reste attachée à l’Arménie, aussi quand son fils Vram change son prénom pour devenir Georges (comme Rita dans le roman de Ruiz devient un temps Joséphine) et veut épouser une Française, elle se sent trahie, «Comment peut-il lui faire ça ? », elle qui aurait voulu des petits-enfants parlant « sa langue » ! L’écriture est différente de l’autre roman, le ton est plus sobre et aussi plus sombre mais le lien d’amour entre la grand-mère et la petite-fille nous entraîne de page en page sans jamais nous lasser.

Ces romans ne sont pas traduits.

La commode aux tiroirs de couleurs, édition JC Lattès, 2020

L étrangère, édition «J’ai lu » nr 11448, 2015

 

 

 

 

 

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